" Il y a deux manières de s'adresser au moral du cheval : une qui terrifie, l'autre qui essaie de parler logiquement à son intelligence.
Fillis a écrit dans son cours d'équitation : " Il y a toujours un moment où le cheval joue son va-tout et se défend en désespéré. Tant qu'un cheval ne s'est pas défendu, son dressage n'est pas définitif."
Or, la lutte offre les plus grands dangers, et si elle ne produit pas toujours la rétivité, elle laisse toujours de vilaines traces dans l'esprit du cheval, dans son organisme et dans ses membres qu'elle tare plus ou moins. ...
En tout cas , le calme, et le calme seul, peut rendre la régularité aux allures qui ont été détraquées. C'est là une des parties importantes du dressage dont la lutte ne peut pas s'occuper. ...
Mettre d'abord en confiance et faire ensuite preuve de douceur en même temps que d'une autorité calme mais inflexible, c'est la règle immuable et souveraine en éducation, même pour celle du cheval.
Quoi qu'il en soit, je laisse à de plus habiles que moi les doctrines et la violence, car elles sont au-dessus de mes moyens, et je mets seulement de mon mieux en pratique cette règle moins tapageuse du général Faverot de Kerbrech :
" La leçon doit être pour le cheval comme pour le cavalier, un exercice salutaire, un jeu instructif qui n'amène jamais la fatigue. Dès que la sueur apparaît, c'est que l'homme a dépassé la mesure. " "
" En 1898, j'ai eu entre les mains, pendant quelques heures, la méthode Fillis. Elle m'a émerveillé par ses photographie et je suis encore très peiné de n'avoir même pas eu le temps de la parcourir entièrement.
Si ma mémoire ne me trompe pas, James Fillis a écrit ( p. 263 ) en substance et très justement, qu'il n'y a pas plus lieu de s'étonner en voyant un cheval déployer impunément pour son organisme, les efforts prodigieux que certains mouvements de haute école nécessitent, qu'il n'y a lieu de s'etonner en regardant les gymnasiarques exécuter leurs tours de force.
C'est par l'exercice rationnel qu'on arrive à rendre les ressorts du cheval, comme ceux des gymnasiarques, capables de se tendre à l'extrème sans se briser."
" En ce qui me conserne, je me réclame hautement de Baucher. ...
Sa méthode est surtout admirable en ce qu'elle est basée sur la conservation du cheval par l'équilibre, la gymnastique raisonnée, les assouplissements et une juste répartition des forces. ...
Est-ce à dire que Baucher soit exempt de critiques ? Non, certes; et, pour ma part, je suis loin de partager toutes ses idées.
Comme :
* Baucher dit que tous les chevaux ont la même bouche et la même sensibilité des flancs. ...
Toutefois, il est
évident que le cheval
qui a la tête basse fait porter
au cavalier sa tête et son encolure;
tandis que, si vous changez l'équilibre
en plaçant la tête et l'encolure hautes, elles
ne pèseront plus sur la main. Baucher confondait
la sensibilité de la bouche avec la légèreté qui résulte
du changement de position de la tête et de l'encolure. ....
* ...lorsqu'il prétend détruire les forces instinctives du cheval et n'agir que sur des forces transmises. ...
Baucher ne détruisait
ni ne transmettait les forces :
il les dirigeait. Il s'emparait des
forces par des assouplissements et
une éducation bien comprise; et, par suite,
empêchant le cheval d'en user à sa guise, il le dominait.
* ... obtenir le rassembler complet par des effets de mains sans jambes et de jambes sans mains, ...
Suivant lui, l'équilibre du
premier genre, que j'appelerai
équilibre parfait ou rassembler complet
s'obtient en faisant agir les mains sans les jambes
et les jambes sans les mains. Mais, là, Baucher se trompe
gravement, car, s'il a fini par trouver l'équilibre du premier genre,
c'est grâce à l'élévation de la tête et de l'encolure qu'il a adoptée
vers la fin de sa carrière, à un moment où il ne pouvait plus monter à cheval.
Je conviens cependant
que, quand l'éducation du
cheval d'école a été poussée
à son dernier degré de finesse,
il exécute pour ainsi dire tous les
mouvements sans le secours des aides:
il suffit, pour l'y amener, de les lui indiquer
avec les rênes flottantes et un simple frôlement du pantalon.
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Néanmoins, je le répète, j'ai pour lui la plus sincère admiration.
Baucher a été un créateur, et tous ceux qui s'occupent d'équitation doivent
lui rendre hommage comme à un maître. Il avait en même temps la grande qualité
de ne rien décrire qu'il ne fût capable d'exécuter. Beaucoup d'autres, après lui, ont longuement
écrit sur l'équitation, et souvent pour décrire de magnifques mouvements qu'ils auraients été fort en peine
de faire exécuter à leurs chevaux. Baucher, lui, prouvait la supériorité de sa théorie en la mettant en pratique.